Dès
le 10ème siècle, c'est l'instrument favori du peuple des campagnes.
Fabliaux et autres écrits de moyen-âge font allusion à la cornemuse,
nommée alors : chèvre, loure, vèze, chalemelle.
Par la suite, trois
cornemuses sont décrites : la cornemuse des bergers, la Musette Royale
et la cornemuse du Poitou. On comprendra aisément que dans
les provinces du centre de la France, ces instruments prirent une
importance extrême.
Après la Renaissance, la cour des Valois et
celle des Bourbon contribuent à faire évoluer ce que l'on nomme alors
les "Musettes Royales". François nous dit même que des grands noms de
la musique classique écrivirent des oeuvres pour la cabrette : Lully,
Rameau Vivaldi !
Une autre période faste pour cet instrument : la seconde moitié du 19ème siècle. Sous l'impulsion d'auteurs romantiques comme George SAND et
"rousseauistes" (ce terme désigne des personnes aimant la nature, la
musique... comme Jean-Jacques ROUSSEAU dont est tiré ce nom) , apparaît
une notion forte : le "régionalisme". En Berry, Auvergne, la cornemuse
devient le symbole du "Petit Pays", un emblème populaire et porteur de
nostalgie.
Cette identité régionale prit également une ampleur
inattendue lors de l'immigration vers Paris des auvergnats venant y
chercher du travail. François nous dit que ces travailleurs cantalous
et aveyronnais, se regroupaient (notamment dans le 11ème
arrondissement, près de la Bastille), pour écouter quoi : devinez un
peu ! "la musette (d'où le bal musette) et la cabrette. Cet engouement
suscita alors à Paris, un artisanat de fabrication assez soutenu
(Amadieu, Franc, Alias, Marcelin, etc.).
La grande guerre mit fin à
cet élan instrumental, lequel reprit quand même dans les années
1975, sous l'impulsion de jeunes musiciens, souvent citadins, à la
recherche, à cette époque, de sons nouveaux.
Longtemps les cabrettaïres passèrent pour des gens louches. On les traitait de simple, original, ivrogne, estropié, vadrouilleur.
De
nos jours, parisianisme oblige, l'image qu'ils projettent ressemble
plus à une image d'Epinal, symbole du passé et un tantinet ringard,
quoique sympathique. C'est vite oublier le travail acharné qu'il faut
accomplir pour extraire un joli son de cette outre recouverte de
velours et d'un coût conséquent (600 euros en moyenne).
C'est vite
oublier également que ces vrais musiciens sont les derniers remparts de
l'oubli. Bientôt, plus personne ne saura jouer de cet instrument
mélodieux et si caractéristique.
Une chance que "par chez nous",
François, en tête, pas loin derrière lui Alain... mais également un
petit nombre de passionnés (que je salue) persistent à jouer, jouer,
jouer, dans les bals, les fêtes et autres foires, pour incruster dans
la mémoire des gens ce qu'est un instrument populaire, une monument
historique... en danger !
Si des jeunes me lisent : hardi les gars, ou les filles, à la cabrette !